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TIFF: 10 films à découvrir cet automne!
Crédit: American Honey (Courtoisie: Remstar)

À Toronto, dès ce jeudi, les studios hollywoodiens mettront en branle une opération séduction à la fois impitoyable et interminable dans l’espoir de voir éclore le prochain Spotlight, 12 Years A Slave ou Slumdog Millionaire. Quelque 397 films en provenance de 83 pays seront projetés sur grand écran un peu partout dans la Ville reine, ce qui présuppose une compétition des plus féroces pour sortir du peloton et récolter les éloges d’un grand nombre de festivaliers.
 
Voilà qui résume les rouages de la planète cinéma qui débarquera bientôt chez nos amis ontariens. La très bonne nouvelle dans tout ça, c’est qu’on s’apprête à se mettre sous la dent du nouveau Oliver Stone, Terrence Malick, Denis Villeneuve, Xavier Dolan, frères Dardenne, Werner Herzog, Pedro Almodóvar et Tom Ford. C’est sans compter la liste de 10 titres – déjà auréolés par la critique – que nous te présentons ci-dessous. Avec un peu de chance (et des programmateurs qui partagent notre appétit pour le cinéma audacieux), les cinéphiles montréalais pourront peut-être retrouver quelques-uns des films ci-dessous au Festival du nouveau cinéma (FNC), aux Rencontres internationales du documentaire de Montréal ou à Cinémania. On se croise les doigts, on envoie un blitz de courriels pour supplier les organisateurs, et on se délecte à épier ces superbes bandes annonces. Bonne rentrée, gang!
 
 
1. La La Land

Renouant avec son passé glorieux de chanteur-danseur-interprète-marionnette émérite du Mickey Mouse Club, Ryan Gosling se prête au jeu d’une comédie musicale réinventée, signée par le très talentueux Damien Chazelle (Whiplash). L’un des films les plus attendus de l’année, ayant lancé la 73e édition de la Mostra de Venise la semaine dernière, La La Land voit éclore un amour si pur et si tendre entre le pianiste de jazz Sebastian (Gosling) et l’actrice Mia (Emma Stone), qui tentent tous les deux de réussir à Hollywood sans pour autant vendre leur âme au diable. Les premiers échos sont plus qu’excellents. (En salles le 16 décembre)
 

2. Prank

Difficile de trouver dans notre cinématographie un long métrage qui s’apparente à Prank, une comédie qui s'annonce complètement décalée, par moments juvénile, souvent hilarante et surprenamment touchante. Cette première réalisation de Vincent Biron raconte les péripéties et mauvais coups pour le moins ambitieux d’une gang d’ados slackers québécois qui s’apprêtent à franchir l’âge de la raison (ish). Dans une exubérante démonstration de « la vie qui imite l’art », les créateurs du film ont à leur tour été auteurs d’une plaisanterie grandiose ce week-end à Venise, lorsque leur banderole promotionnelle exhibant le dessin d’un immense phallus a été confisquée par la police italienne. Le #PenisGate est ainsi né. (En salles le 28 octobre)
 

3. Two Lovers And A Bear

Tourné dans le Grand Nord canadien, ce sixième long métrage de Kim Nguyen (Rebelle) se situe quelque part entre drame psychologique et romance arctique. Empreint d’onirisme, Two Lovers a reçu un bel accueil ce printemps à Cannes pour son récit de deux amants solitaires et un brin tourmentés tentant de fuir les démons de leur passé dans un petit village où il fait régulièrement moins cinquante degrés. Un road-trip en plein blizzard avec ours parlant en prime pour Roman (Dane DeHaan, Life) et Lucy (Tatiana Maslany, Orphan Black). (En salles le 7 octobre)
 

4. American Honey

Pour ce road-trip survolté primé à Cannes, la cinéaste britannique Andrea Arnold (Fish Tank) s’est d’abord inspirée d’un fascinant reportage du New York Times qui dressait le portrait d’ados marginaux parcourant les États-Unis dans une camionnette, faisant la fête et parfois aussi du porte-à-porte pour vendre des abonnements de revues. Trois heures de cinéma sauvage pendant lesquelles tu seras confronté à une jeunesse s’abreuvant de trap, de nuages de fumée, de triangles amoureux sulfureux et de Shia LaBeouf se déhanchant sur du Rihanna dans les supermarchés. (En salles en octobre)
 

5. Fuocoammare

Récipiendaire de l’Ours d’or à la Berlinale l’hiver dernier, ce très beau documentaire est le fruit de plus d’un an passé à observer le quotidien à Lampedusa, petite île méditerranéenne que des centaines de milliers de migrants ont tenté de rejoindre au cours des vingt dernières années. Le réalisateur Gianfranco Rosi tisse deux trames narratives qui ne se chevauchent (pratiquement) jamais : celle des habitants de l’île – une petite communauté tissée serrée de pêcheurs, dont un jeune garçon qui s’en donne à cœur joie avec son slingshot bricolé – et celle des migrants ayant échappé au désastre et à la mort en mer. Pas de raccourci ou de réponse facile pour expliquer l’absence de croisements entre ces deux groupes. Une situation complexe que Rosi aborde avec adresse, intelligence et énormément d’humanisme.
 

6. Divines

Incontestablement le film français le plus gangsta de 2016, qu’on décrit déjà comme un Scarface français et féminin, ce premier long métrage d’Uda Benyamina a raflé la Caméra d’Or à Cannes il y a quelques mois. Galvanisée par les émeutes ayant secoué la France en 2005, Benyamina a voulu dépeindre des filles prisonnières de la cité qui rêvent à tout prix de s’en libérer en gagnant de la thune. Suite à une rencontre fortuite avec la grande dealeuse du quartier, Dounia peut gravir les échelons du crime et se payer une nouvelle vie avec son acolyte Maïmouna. Une réplique culte qu’on retiendra de cette bande de filles lucides et combatives? « T’as du clito. »
 

7. Paterson

Jarmusch présentera deux fois plutôt qu’une au festival, avec son sympa rockumentaire sur le parcours trépidant d’Iggy Pop and the Stooges, Gimme Danger. Son autre film aborde également le processus créatif, mais emprunte plutôt le chemin de la fiction contemplative. Une puissante ode à l’harmonie domestique et à la routine modeste, Paterson (Adam Driver) est un chauffeur d’autobus habitant Paterson au New Jersey. Lorsqu’il n’est pas derrière le volant, il devient alors poète. Dans son carnet secret, il pond de petites perles se rapprochant du haïku, portant souvent sur sa femme rayonnante (Golshifteh Farahani). Vivre l’instant présent et connaître le micro-bonheur, façon Jarmusch.
 

8. Ceux qui font les révolutions à moitié n'ont fait que se creuser un tombeau 

Mathieu Denis et Simon Lavoie n’ont jamais eu froid aux yeux. Laurentie, leur première coréalisation à la mise en scène radicale mettait le doigt sur le malaise identitaire de « cette ostie de province de merde » (!), pour citer son protagoniste Louis Després. Avec Ceux qui font, Denis et Lavoie reviennent cette fois sur la mobilisation étudiante du Printemps érable. Un film essai encore plus audacieux que Laurentie, tant dans la forme que le fond, Ceux qui font se penche sur un groupuscule de quatre Montréaiais aux idéaux révolutionnaires qui refusent le statu quo du Parti Libéral relooké trois ans post-casseroles, et qui n’excluent surtout pas le recours à ce qu’on appelle couramment le terrorisme d’origine intérieure…

 
9. Moonlight

On met de côté la controverse entourant Birth of a Nation et le passé pas très catholique de son réalisateur Nate Parker. Un des grands films de l’année, une œuvre qui fait déjà l’unanimité critique et derrière laquelle tous pourront facilement se ranger, c’est ce deuxième long métrage de Barry Jenkins (Medicine for Melancholy), qui sonde avec justesse les multiples codes régissant la masculinité afro-américaine. Raconté sous forme de triptyque, soit l’enfance, l’adolescence et l’âge adulte du jeune Chiron à Miami, on compare déjà Moonlight à Brokeback Mountain et à Carol pour l’acuité de sa représentation de désirs inassouvis et des refoulements qui déchirent de l’intérieur… Le film marquera aussi le premier rôle de Janelle Monáe au grand écran.
 
 
10. Christine

À Sundance l’hiver dernier, deux films à la programmation portaient sur le même fait divers depuis longtemps tombé dans l’oubli : le mystérieux suicide en direct de la lectrice de nouvelles floridienne Christine Chubbuck en 1974, après avoir lu une lettre dans laquelle elle dénonçait l'intérêt démesuré de ses patrons pour le sensationnalisme, « le sang et les tripes ». Les deux films (l’autre étant une docu-fiction intitulée Kate Plays Christine) sont excellents, mais Christine est le seul à refaire surface au TIFF. Réalisé par Antonio Campos (Simon Killer), cette version 100% fictive et perturbante voit Rebecca Hall (Vicky Cristina Barcelona) incarner une Christine talentueuse mais profondément troublée.

 
Festival international du film de Toronto
Du 8 au 18 septembre 2016  | tiff.net

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