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«Les Aiguilles et l’opium» au TNM: la pièce qui rend dépendant à Marc Labrèche et Robert Lepage
Crédit: Nicola-Frank Vachon

À des années-lumière de l’univers déjanté des Bobos, de 3600 secondes d’extase, de La fin du monde est à 7 heures, et à quelques galaxies des Matusalem de notre enfance, Marc Labrèche ne quitte pourtant pas d’un poil le génie qu’on lui connait, en plongeant dans le monde absolument fascinant de Robert Lepage dans Les Aiguilles et l’opium.

Occasion unique de voir l’acteur se servir de la palette dramatique de son talent, cette pièce fait partie des rares œuvres dont l’histoire est aussi puissante que la scénographie.

L’histoire débute en 1989 avec Robert, un comédien québécois de passage à Paris, qui loge dans un hôtel où ont déjà séjourné Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre. Hanté par les restes d’un amour qui l’étouffe, happé par le manque de confiance en lui qui l’oppresse, il doit passer quelques jours dans la Ville Lumière afin d’enregistrer la narration d’un documentaire sur Miles Davis, plus précisément sur le passage du célèbre trompettiste au Festival international de Paris en 1949.

Le musicien va à la rencontre de l’élite artistique et intellectuelle de Paris, et fait la connaissance d’une certaine Juliette Greco, qu’il refusera d’épouser pour lui éviter le sort réservé à l’époque aux couples mixtes aux États-Unis.
Nicola-Frank Vachon
Pendant que Davis essaie de combler le vide de ses amours déçues en sombrant dans la désinvolture artificielle de l’opium, le comédien tente de désintoxiquer son cœur de certains souvenirs et de réapprendre à respirer, vivre et créer. À quelques occasions, ils céderont les planches à l’écrivain Jean Cocteau, qui raconte New York après un bref séjour américain.

Grâce à la touche magique de Robert Lepage, l’enchevêtrement des trois histoires est mené de main de maître, tant par les fils qui relient les protagonistes et leurs questionnements existentiels, que dans le ballet acrobatique dans lequel ils évoluent.

Planqués dans un énorme cube, servant à la fois de club de jazz, de New York d’autrefois et de chambre d’hôtel d’une époque à l’autre, les comédiens évoluent dans une structure pivotante qui regorge d’outils et d’astuces pour entrer, sortir et voir flotter ses souvenirs, ses pensées ou quelques notes de jazz.

Jamais on n’a l’impression que la machine prend le pas sur l’histoire. Jamais on ne quitte Marc Labrèche du regard. Jamais on n’espère de lui une farce ou un cabotinage, tant il est investi, vrai et débordant de talent. Jamais on ne pourrait saluer davantage la grâce qui résulte de l’union entre un grand acteur et un grand metteur en scène.  

Les Aiguilles et l’opium est présentée au TNM jusqu’au 31 mai.

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