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Anne-Élisabeth Bossé, la cokée des Bobos, nous jase actuariat, Tim Hortons et beauté

« Des fois, je suis devant mon ordi, pis j’angoisse. J’ai une inquiétude. Je me dis, s’il fallait que quelqu’un meure à chaque fois que je clique sur actualiser, je serais toute seule en crisse sur la planète ! » En lançant cette réplique savoureuse en ouverture du film Les amours imaginaires, Anne-Élisabeth Bossé était loin de se douter qu’elle marquerait toute une génération de cinéphiles et qu’elle décrocherait une nomination aux Prix Génie pour son rôle de fille à lunettes. Accumulant depuis des contrats au cinéma (Le sens de l’humour, Laurence Anyways), à la télévision (Les Appendices, Les Bobos) et au théâtre (Chaque Jour, Ines Pérée et Inat Tendu), voilà qu’elle remonte sur les planches du théâtre La Licorne pour jouer dans L’obsession de la beauté, une pièce où une réplique coup de poing fait tout basculer.

 

NIGHTLIFE.CA : Quelle a été ta première expérience avec le théâtre ?
Anne-Élisabeth Bossé : Disons que si on oublie la pièce que ma prof de sciences nature m’a demandé d’écrire sur les 3 R (Réduire, Réutiliser, Récupérer) en première année, j’ai commencé à vouloir faire du théâtre avec la troupe de l’école en troisième secondaire. Mais j’étais tellement pouiche qu’on m’avait donné un rôle avec une réplique à la fin d’une pièce de 2 h 30. Cette année-là, une enseignante m’avait conseillé de faire quelque chose pour que j’arrête de parler sur le bout de la langue et ça m’avait fait de la peine. Comme ma mère n’a pas aimé voir sa petite fille triste, elle m’a amenée chez l’orthophoniste et j’ai suivi plusieurs cours de diction après l’école.

Plus tard, j’ai même envisagé devenir autre chose que comédienne. Je suis allée voir un orienteur qui était du genre à conseiller des métiers pour combler les besoins de la société, au lieu de s’intéresser à ce que je voulais vraiment faire. Il a commencé par me suggérer les Forces armées ! Ensuite, en voyant que j’étais très forte en mathématiques, il m’a proposé d’envisager l’actuariat. Il m’avait même montré une vidéocassette où on voyait un actuaire travailler. Quand j’ai vu le gars chauve à côté de sa plante verte, ça m’a convaincue de faire du théâtre. J’en faisais matin et soir, et j’en mangeais sur mes toasts !


Crédit : Nous sommes les filles 

Te rappelles-tu de ta première audition pour entrer dans une école de théâtre ?
Oh oui ! C’était le jour le plus important de ma vie et tout se passait mal. Ma réplique était prise dans un autobus, j’avais oublié mon portefeuille dans un café et j’étais arrivée comme un coup de vent à l’audition. Je voyais les autres candidats faire des ba-be-bi-bo-bu autour de moi, je suis entrée sans avoir le temps de stresser et je suis sortie sans me rappeler de rien.

Même si tu avais fait beaucoup de théâtre et de télévision après ta sortie du conservatoire, est-ce que le regard des gens a changé depuis ton rôle dans Les amours imaginaires ?
Je reçois plus d’offres qu’avant. L’agente de casting qui s’occupait de 30 vies m’avait aimée dans le film et elle m’a fait confiance grâce à ça. Après le film, plusieurs personnes m’arrêtaient sur la rue pour me dire qu’ils avaient été vraiment touchés par le film. Mais pour mes proches, ça n’a rien changé. Mes parents se réjouissaient autant pour une pub de Tim Hortons que pour un film qui est allé à Cannes. 

À quoi doit-on s’attendre en assistant à la pièce L’obsession de la beauté ?
Tout part d’une réplique anodine qui crée un ouragan incontrôlable. Lorsque mon personnage apprend que son chum l’a comparée à une bimbo en disant que sa blonde (moi) a peut-être une face plus ordinaire, mais qu’il ne l’échangerait pas pour un million, c’est la catastrophe. La pièce s’intéresse à la difficulté de communiquer et à l’importance qu’on accorde à la beauté. C’est violent, cru, rapide, tout est livré du tac au tac, sans silence. C’est un véritable coup de poing au visage. On rit franchement de leur méchanceté, mais sans ressentir de malaise. Ce n’est pas le gros rire gras du théâtre d’été, mais c’est un feu roulant. Le train arrive, t’embarques et tu sors après 90 minutes en te disant « wow ».

Comment t’es-tu sentie en te faisant proposer le personnage d’une fille qu’on qualifie d’ordinaire ?
Quand le metteur en scène, Frédéric Blanchette, m’a appelée, il pesait ses mots et je le sentais super mal à l’aise. Il me disait qu’il me trouvait super belle et il m’a très bien vendu le personnage. En même temps, je suis consciente de ce que je projette. Je n’ai jamais été engagée pour jouer la tombeuse ou la femme fatale. Dans notre métier, on est souvent confronté à notre apparence et à ce que les autres pensent de nous. Il faut arriver à se désensibiliser.

Étant donné que tu es ton propre instrument de travail, quel est ton rapport avec ton physique et ta beauté ?
Au conservatoire, une prof de tragédie classique avait dit au groupe : « toutes les filles de la classe, vous allez pouvoir jouer des jeunes premières… sauf peut-être vous, Anne-Élisabeth ». Ça m’avait fait de la peine à l’époque, mais j’ai réalisé après coup que ce n’est pas si l’fun de jouer des jeunes premières. Avec le temps, j’essaie de transformer en force ce que je voyais comme des failles ou des faiblesses. J’ai un visage hyper atypique qui me permet de me distinguer, d’être unique et je dois être fière de ça. C’est un avantage en tant que comédienne.

Quels sont tes projets pour les mois à venir ?
J’ai quelques chroniques à l’émission Alors on jase. En janvier, je vais apparaître dans Toute la vérité. Je vais aussi jouer une prostituée dans Saison Deux, la nouvelle série des auteurs des Invincibles, Jean-François Rivard et François Létourneau. J’ai reçu les textes cette semaine et c’est très différent de tout ce que j’ai fait à la télé.

 

L'obsession de la beauté 
Du 19 novembre au 14 décembre
Théâtre La Licorne | 4559, Papineau | theatrelalicorne.com

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