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Souveraines : Une habile réflexion sur le pouvoir au féminin
Crédit: Bruno Guérin

Dans Souveraines, le personnage qu’incarne Rose-Maïté Erkoreka fait partie d’une troupe de théâtre et a écrit son premier texte afin qu’il soit monté par la compagnie. C’est exactement ce qu’est la pièce : le résultat d’un premier effort dramaturgique de l’auteure, de qui Maïa n’est pas tellement éloignée. Une immense – et souvent amusante – mise en abîme et une réflexion sur la place des femmes dans les hautes sphères du pouvoir.
 
Le Théâtre de la Banquette arrière, dont nous avions bien apprécié la précédente production, Amour et information, existe depuis plus de 18 ans, ce qui constitue presque une anomalie dans un paysage théâtral friand d’éphémère. La troupe amateur fictive qui est ici mise en scène, dirigée par Phil (Sébastien Dodge), un despote narcissique, s’apprête à choisir la prochaine pièce qui sera montée et un vote a lieu pour déterminer s’il s’agira des Rois maudits, une adaptation de la série de romans de Druon ou d’un texte original sur les reines, écrit par Maïa.
 
Les petits différends entre les membres de la troupe demeurent tout d’abord bénins, puis prennent de plus en plus d’ampleur, allant jusqu’à menacer la stabilité même du petit microcosme. La personnalité grandiloquente du meneur, qui manipule sans cesse la vérité et se donne en spectacle avec ses épouvantables sautes d’humeur pimentées d’abus, verse davantage du côté de l’exagération que du réalisme, mais demeure un moteur nécessaire pour l’avancement de l’intrigue.

Crédit : Bruno Guérin

 
La disposition des actrices et des acteurs sur scène ressemble assez souvent à des peintures classiques, d’une excellente composition, l’une des facettes les plus réjouissantes de la mise en scène très vivante de Marie-Josée Bastien. Au-dessus de la scène, une rangée d’écrans projettent des segments de discours ou d’entrevues de personnalités telles qu’Hillary Clinton et Benazir Bhutto, Pauline Marois et Valérie Plante, bonifiant les propres réflexions de l’auteure à propos du pouvoir au féminin.
 
Car la Maïa de Rose-Maïté Erkoreka est tellement investie dans sa création qu’elle hallucine des reines, réelles ou fictives, qui la visitent pour lui souffler des conseils. On sait qu’autrefois, diriger était une affaire d’hommes, mais de nos jours, la force physique est loin dans la liste des prérequis pour gérer un peuple. Et pourtant, les femmes cherchant à se hisser dans les hautes sphères du pouvoir se butent souvent à des obstacles, issus d’une structure paternaliste rétrograde qui est rarement remise en question. Une fois au pouvoir, on les traite aussi généralement avec plus de sévérité que leurs équivalents mâles.
 
C’est un sujet fascinant qui aurait certes pu être développé pendant beaucoup plus longtemps, mais la concision exemplaire du texte est à saluer. En à peine 1 h 30, on aborde des questions fondamentales, on fait un détour par la souveraineté, on s’amuse beaucoup des dialogues assassins et on admire l’énergie et la bonne humeur de l’ensemble des interprètes. C’est aussi une méditation sur le doute et une incitation à l’ignorer, à aller de l’avant avec nos projets les plus audacieux et hors normes, qu’on soit un homme ou une femme.
 
Souveraines est présentée au Théâtre de Quat’Sous jusqu’au 8 décembre.

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