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Les célèbres muralistes français Ella & Pitr embellissent les rues et toits de Montréal!
Crédit: Ella & Pitr

En flânant dans les rues de Montréal, cet été, vous avez peut-être remarqué la présence discrète d’Ella & Pitr. En effet, l’œil exercé peut observer quelques-uns de leurs stickers sur les murs de la ville. L’ironie dans tout ça (les p’tits stickers discrets), c’est qu’Ella & Pitr sont reconnus comme des maîtres du gigantisme. Ils ont récemment fait leur entrée dans le Livre Guinness des records après avoir produit la plus grande murale de l’histoire à Sola (Norvège), dans le cadre de Nuart 2015. Toutefois, si cet amour du «Think big, sti!» n’est pas immédiatement visible au niveau de la rue, il l’est lorsque l’on arpente les toits de la métropole. Dix personnages aux proportions gargantuesques ont été réalisés par le couple français, dans les deux dernières années, sur les hauteurs du 514. Afin de vous faire découvrir ces bijoux méconnus, j’ai échangé quelques courriels avec ces artistes un peu secrets, qui laissent leur marque teintée de rêve un peu partout sur la planète.
Crédit: Page Flickr Ella & Pitr
Ils se sont rencontrés en 2007, à Saint-Étienne, alors qu’ils étaient tous deux à la recherche d’un beau mur où apposer leur art. C’est à peu près tout ce que je sais de leur histoire et c’est pas mal tout ce qui importe. Le couple, aussi connu sous le nom des Papiers peintres, s’est depuis transformé en tandem hyper efficace ayant acquis une reconnaissance internationale grâce, entre autres, à la série “Sommeils lourds”. Ces personnages immenses, généralement des gens âgés ou des enfants assoupis, dégagent une vulnérabilité paisible qui semble un peu à l’antithèse de leur taille monstrueuse. Ella & Pitr m’expliquent comment ils perçoivent leurs créatures: «Nous travaillons de façon très intuitive. Ce qui nous touche et que nous cherchons à véhiculer à travers nos colosses, c'est peut-être d'abord une question de poids, l'idée qu'ils pourraient se réveiller à tout moment et suggérer l'envergure de la bête si cela arrivait. Il y a aussi l'idée que s'ils dorment, c'est qu'ils sont ailleurs et cela ouvre une porte sur un autre espace. Et enfin, cet état d'avant (ou après) l'action nous semble plus intéressant au niveau de la tension dramatique que l'action en elle-même. Eux sont des volcans qui sommeillent et nous en sommes les fourmis. Eux sont apaisés et nous sommes vulnérables.»
 
Sans être explicitement contestataire, leur travail suggère un malaise face à la société dans laquelle ils évoluent; l’art naïf étant souvent le meilleur moyen d’insinuer, sans être ouvertement pédagogique et grinçant. Par contre, la crise des réfugiés qui secoue présentement l’Europe les a poussés à une action plus directe, dans la ville de Stavanger. «Nous avions prévu d'investir quelques panneaux publicitaires à Stavanger et le matin où nous allions nous mettre à l'œuvre, nous sommes tombés sur la photo du petit garçon échoué sur la plage. Ça nous a coupé tout élan, quel qu'il soit. Pire, tout ce qui nous entourait résonnait comme un non-sens absolu, et tout ce que nous allions produire nous semblait totalement dénué de sens, complètement futile. Des bateaux de pêche retrouvent parfois des enfants dans leurs filets… Nous ne pouvions rien faire d'autre qu'écrire cette phrase à ce moment-là. C'est insoutenable, n'est-ce pas?» Oui.
Crédit: Page Flickr Ella & Pitr
Comme je le mentionnais plus haut, Montréal à la chance d’être ornée de 10 œuvres différentes, offertes par les Papiers peintres. Je leur cède le micro, afin qu’ils vous expliquent ce qu’elles sont, ceux qui les ont aidés à les produire et, surtout, où vous pourrez les trouver, si vous vous sentez aventureux. «Alors là, nous en profiterons d’abord pour remercier Côme Barrois de Little Lab, car c'est lui qui a trouvé tous nos terrains de jeux à Montréal, avant notre arrivée. Big up Cômy! Il y a 10 colosses qui sommeillent sur Montréal: un clochard céleste sur un toit près des voies ferrées, vers Préfontaine (là, il faut dire merci à tonton Ankh et le A'Shop); une bourgeoise effondrée sur le toit d'un bâtiment très touchant qui se trouve dans le quartier des buildings entre Saint-Paul et McGill (et là, on salue au passage Jessie et sa blonde); puis, il y a un clochard royal qui veille sur deux réfugiés népalais sur les toits et parkings d'Oxfam Québec; il y a une fille perdue, un contorsionniste et un sans-abri, comme une petite fratrie, sur le toit de nos nouveaux amis à 7 doigts; il y a le grand et gras Poutinos-le-saoûl sur le toit de la bibliothèque Mercier et enfin l'indien déraciné sur le toit d’Illustration Québec. Nous avons croisé cet homme par procuration dans un parc de Montréal. Il tenait entre ses mains une pancarte «I suck for 5 dollars» et tremblait sous le manque. Hardcore again, isn't it?» Oui.

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