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Le Détesteur: il faut qu’on parle de cette chasse aux sorcières

Il y a de ces thèmes d'actualité que tu préfères ne pas aborder, parce que bon, t'as l'impression que tout a été dit déjà. T'as beau retourner ça de toutes les façons, il t'est malgré tout impossible de voir de quel angle tu pourrais traiter le sujet. Important: tu ne le fais pas pour les clics, du moins, jamais uniquement pour les clics. Substance avant tout. Et si la pertinence te rapporte beaucoup, well, tant mieux.

Et d'autres fois, il arrive que tu n'aies plus le choix, où tu espères même que ton grain de sel, similaire à celui de tes confrères, puisse contribuer à faire une différence, aussi minime soit-elle. Il y a de ces fois où tu te dis que même si on nage dans l'évidence et que tout le monde semble savoir, ceux qui savent déjà peuvent attendre, que cette chronique et seulement celle-là, tu la dédies exceptionnellement et exclusivement à ceux qui n'ont pas encore compris.

Il est évidemment ici question d'islamophobie, d'ignorance et d'intolérance. Parce que ce qui aurait pu nous apparaître comme presque innocent, limite bénin, à pareille date l'an dernier sur Facebook, semble s'être invité dans notre vie de tous les jours. La haine a finalement trouvé moyen de traverser les écrans pour se tailler une place dans la réalité. Les médias qui cherchent à faire craindre le pire depuis les accommodements raisonnables des mid00s peuvent s'en féliciter, l'impact qu'ils ont eu (et ont encore) est considérable.

On y est donc. Chasse aux sorcières. On est là. Man. J'écris ceci et je ne peux pas croire.

L'effet Martineau se fait ressentir sur toute la province. Des cas comme celui de Diane Blain qui refuse les services d'une femme voilée sont de moins en moins isolés, seulement, ils ne sont pas tous forcément médiatisés. Et c'est ça qui commence à être inquiétant; les histoires qui font les manchettes sont en quelque sorte inusitées puisqu'elles démontrent qu'on peut les compter sur les doigts, tandis que celles qui restent dans l'ombre, les anecdotes qui sortent de la bouche d'un membre de la famille, d'un voisin de table chez Tim Hortons, s'accumulent et révèlent malheureusement que l'islamophobie s'est peut-être bel et bien banalisée, installée confortablement et impunément dans le quotidien du commun des mortels.

Ce qu'on peut noter de différent avec le climat de l'an dernier c'est que cette fois, le doute a laissé sa place à la certitude. On ne craint plus d'avoir l'air ignare et intolérant; on l'est, point. Avec les médias pour complices, on valide puis on assume. Ça suffit d'avoir à toujours se poser des questions, de faire dans la nuance; on a vu des fusils à la télé, des gens mourir, ça me paraît suffisant: on ferme le dossier. «Ils sont là pour nous imposer leurs lois» est la réponse qui convient aux ignorants pour qui il est devenu beaucoup trop laborieux de penser.

Ainsi, la petite madame gentille du café qui se montrait toute ouïe lorsque je lui rappelais l'importance de ne pas en venir aux amalgames ne veut plus rien entendre. «Pars-moé pas là-dessus, toé!», qu'elle me lance désormais à chaque fois. Comme si elle s'était sentie conne, manipulée de m'avoir écouté quand je lui répétais que personne ne cherche à nous envahir. Comme si la dernière année m'avait donné tort et qu'elle préférait s'en tenir à son idée initiale, à son ignorance. 

Comme plusieurs, elle a opté pour l'islamophobie. L'intolérance. La chasse aux sorcières. C'est bien triste pour notre époque, mais surtout, c'est malheureux pour tous ceux qui sont confrontés à de telles horreurs au quotidien. 

Sache, petite madame gentille, que je me sens mal et sali à chaque fois que quelqu'un se sent bien à l'aise d'entretenir en ma présence des propos xénophobes en s'imaginant que j'acquiescerais d'emblée seulement parce que je ne suis pas visiblement arabe ou musulman. L'ignorance est ta religion et celle-là est bien pire que toutes les autres. C'est toi qui me fais peur.

Je te déteste. 

 

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