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Le Détesteur: pourquoi mon rhume est le moment fort de mon année 2014

Depuis samedi dernier, j'ai contracté le rhume. Clearly dans mon best of de l'année en cours.

On me demande: qu'est-ce que t'as, t'es malade? Je réponds: En général? Ou bien là, là? Parce qu'en général, je suis malade, oui, pis en ce moment, ce qu'on appelle être malade, ce rhume, ce qui m'affaiblit mentalement et physiquement, m'apparaît plutôt comme un baume, un remède temporaire contre quelque chose de plus nocif et viscéral qui pourrit mon existence à longueur d'année.

Je suis malade de Facebook, de ses likes et de l'approbation de nombreux inconnus, collègues et amis. Malade du multitâche. Internet a gâché mon été, cet été que j'avais pourtant convoité plus que tous les autres.

Man, j'avais un seul pneu à faire gonfler sur mon nouveau vélo (2013) pis je l'ai laissé chiller dans mon salon d'avril à septembre. Ma bibliothèque déborde de bouquins qui auraient dû être dévorés dans un gazon invitant aux abords du fleuve; jamais arrivé.

J'ai compris que j'étais atteint le jour où je n'arrivais plus à m'abandonner dans une série télé. Game of Thrones. 2011. Rien à faire. Depuis, j'ai tenté le coup avec Sons of Anarchy qui fut rapidement succédé par Orange Is the New Black, House of Cards, American Horror Story et Hemlock Grove. Im-po-ssi-ble. Il y avait toujours plus important à faire. Par important il faut lire: rien du tout, au final.

La plupart de mes nuits, j'étais là, à ma table de cuisine, à pouvoir/vouloir m'adonner à tout, simultanément. Chromebook devant moi, onglet Facebook qui ne peut rester fermé plus de 3 minutes. Porte de frigo grande ouverte; un rappel à mon estomac qu'il va bien falloir manger. Télé du salon m'attendait. Netflix sur le Xbox me promettait que cette fois, on arriverait à adhérer à une nouvelle série. Lumières de balcon à "On" pour prendre l'air un peu. Roman à portée de main (pour le balcon). 50% linge mou, 50% vêtements urbains, au cas où l'idée d'aller prendre un verre me passerait par la tête.

La copine qui m'appelle, moi qui visiblement suis trop occupé à tenter de l'être. À fixer le vide, refresher le newsfeed Facebook malgré que tout le monde ne publie que de l'esti de marde.

5AM: ferme tout. Facebook l'a emporté sur tout le reste. Il ne s'est rien passé.

Well, ma vie est un début de tout et le regret perpétuel de ne jamais rien faire au complet. Tranquillement, le navigateur Google Chrome s'est transposé dans ma vie et s'est converti en lifestyle où des dizaines d'onglets sont mis en suspens jusqu'à les fermer d'un violent coup avant d'aller dormir, sans même y avoir jeté un oeil.

Mais heureusement qu'il y a les abonnés et les likes, tsé. Quelque 500-1000 likes de fin de soirée sont suffisants pour annuler les regrets. Quand même, 500-1000 personnes qui t'approuvent d'une shot; c'est pas rien. Ça fait que cet univers t'apparaît comme crissement plus valorisant que ta vraie vie à toi où, trop souvent, vulnérabilité et transparence sont perçues comme des faiblesses.

Fak tu restes là, en essayant supra-fort de te convaincre qu'il y a mieux à faire que d'te faire répéter par des centaines d'inconnus que t'es donc bin awesome (c'est c'que tu t'imagines, quand t'es malade de l'Internet). Mais c'pas évident, tsé. 

Pas évident, sauf quand t'as un rhume, immobile, au lit. T'as pu la force de multitâcher, pu la force de passer ta vie à sélectionner sans jamais arrêter ton choix sur une seule activité, pu la force d'accorder une quelconque importance aux likes. 

Ces derniers jours, ils étaient awesome. J'ai lu, dormi longtemps et suis passé au travers d'une saison complète d'un TV show sur Netflix. 

Ce matin, la fièvre n'était plus et j'ai récidivé; voilà qui marquait le grand retour de Facebook dans ma vie. Mais je garde tout de même le souvenir de cette longue fin de semaine qui m'aura permis de retrouver ce que j'avais laissé en stand by il y a quelques années de ça, de ce bref séjour dans la réalité.

Un jour, j'y retournerai et m'y installerai pour de bon. J'en ai quelques larmes rien qu'à y penser.

Je vous déteste.