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L’acteur Patrick Hivon, un des mâles alpha du Québec, nous parle de tous ses rôles de bums et d’écorchés
Crédit: En 2013, Patrick Hivon montera sur les planches du Théâtre La Licorne dans Amour/Argent, en plus de voir son visage projeté sur grand écran dans L’ange gardien.

Il a joué un beau gosse dans Lance et Compte, un fendant fils à papa dans Rumeurs, un trou du cul dans L’Affaire Dumont et un homme écorché dans À l’origine d’un cri. On a également pu le voir dans plusieurs émissions comme Trauma, Providences, Tribu.com et Temps dur. En 2013, Patrick Hivon montera sur les planches du Théâtre La Licorne dans Amour/Argent, en plus de voir son visage projeté sur grand écran dans L’ange gardien, un film dans lequel il a joué aux côtés de son mentor, Guy Nadon.

Quel a été ton premier contact avec le jeu?
Je viens d’une famille où on se moque un peu de tout le monde et de nous-mêmes. Quand j’étais enfant, je vivais dans un quartier avec des gens de plusieurs cultures différentes. J’ai commencé à jouer en imitant mes voisins qui parlaient portugais, créole ou italien. Au primaire, j’aimais ça me montrer. J’avais besoin de beaucoup d’attention. J’ai fait du théâtre parascolaire au secondaire et je suis allé faire une audition à Lionel-Groulx. Ils m’ont renvoyé chez moi en me disant d’aller manger mes croûtes.


Patrick Hivon et Jean Lapointe dans À l’origine d'un cri

Pourquoi penses-tu avoir fait autant de rôles de bums et d’écorchés?
J’aime l’humain dans ses défauts. Je trouve ça touchant. Le parfait et le lisse ne m’intéressent pas. C’est la même chose avec les meubles et les objets : j’aime voir le travail du temps, l’usure et les cassures. À l’École Nationale, je me souviens qu’André Brassard et Alice Ronfard s’étaient donné la mission d’exacerber la masculinité des gars et la féminité des filles. Ça m’avait surpris. Je ne me sentais pas très mâle dans le temps. J’ai joué beaucoup de conquérants, d’aventuriers et de personnages de gars très rustres.

Depuis ma sortie de l’école, j’ai été beaucoup associé à des rôles de gars-gars, mais je pense qu’il me reste encore beaucoup à exploiter : la candeur, la comédie ou un personnage de gai, par exemple. Bientôt, je vais jouer dans Nouvelle Adresse, une série écrite par Richard Blaimert, où j’interprète un homosexuel très discret sur sa vie personnelle. Il est doux et très à l’écoute des autres, mais sans jamais se livrer. C’est très différent de ce que j’ai fait avant. 

Si on additionne toutes les pièces de théâtre, les films, les webséries et les émissions de télé auxquels tu as participé, on dépasse les 30 projets en 12 ans. Pourtant, on ne te voit pas jouer la carte de la vedette. Est-ce un choix?
Je ne suis pas à l’aise avec le vedettariat. Ça me tape ben gros. Ma religion à moi, c’est d’incarner un personnage avec le plus de sincérité possible pour toucher le monde. J’essaie de jouer avec la même simplicité que celle que je recherche dans ma vie. Je ne veux pas que Patrick prenne le dessus sur mon rôle. C’est toujours agréable quand les gens reconnaissent mon talent, mais j’aime encore plus quand ils aiment mon personnage. Je préfère passer inaperçu. C’est peut-être utopiste, mais j’ai de la misère à aller me montrer.


Isabelle Roy et Patrick Hivon dans Amour/Argent (Crédit: Valérie Remise)

Du 1er au 27 avril, tu joues à la Licorne dans Amour/Argent, une pièce écrite par Dennis Kelly, qui n’a pas l’habitude de donner dans la légèreté. Est-ce que c’est encore le cas cette fois-ci?
Tout à fait. C’est un mélange de malaises, de drame et d’humour noir qui fait mal à voir. Marie-Hélène Thibault et moi, on joue un couple amoureux qui sont devenus junky à l’argent. Dans un courriel, mon personnage avoue qu’il a trouvé sa femme sur le plancher de la cuisine après qu’elle ait tenté de se suicider. Mais elle n’était pas morte. Au lieu d’appeler les secours, il l’a achevé. Parce qu’elle commençait à coûter trop cher… Dans cette pièce-là, j’ai l’impression de jouer la faiblesse humaine. Ça nous montre qu’après des milliers d’années sur terre, les humains n’ont pas encore compris comment faire. 

Plus tard cette année, on te verra au cinéma dans L’Ange gardien, réalisé par Jean-Sébastien Lord. À quel genre d’histoire doit-on s’attendre?
Dans le film, on suit le personnage de Normand (Guy Nadon), un gardien de sécurité, qui surprend un couple (Marilyn Castonguay et moi) en pleine tentative de vol. Les choses tournent mal. Quelques semaines après, la blonde de mon personnage retourne voir le gardien. Le film s’intéresse à ce que vivent les personnages après l’événement. Et il y a tout un volet fantastique que je dois taire, avec un genre d’histoire parallèle. J’ai lu deux fois le scénario pour tout comprendre.

Comment c’était de jouer avec Guy Nadon, qui t’a enseigné à l’École Nationale?
J’ai eu un plaisir fou à lui donner la réplique. Lorsqu’il m’a enseigné Shakespeare à l’école, il nous a appris à désacraliser le texte, pour éviter de jouer des personnages drabes, trop polis et sans faille. Je me souviens d’une phrase où il disait que pour jouer, on devait avoir les pieds dans la boue, les mains dans le sang et la tête dans les nuages. Ça m’avait beaucoup interpellé.

Amour/Argent
Du 1er au 27 avril
Théâtre La Licorne | 4559, Avenue Papineau | theatrelalicorne.com