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Critique du film «Avant que mon cœur bascule» : portrait d’une jeune délinquante qui ne convainc guère

À première vue, tous les bons éléments semblaient réunis pour livrer une œuvre émouvante. Un réalisateur, Sébastien Rose, qui a fait ses preuves (Le banquet, La vie avec mon père); un casting digne de confiance (Sébastien Ricard, Alexis Martin); une histoire de fuite adolescente et de rédemption inédite; même notre Cœur de pirate nationale qui donne un ton mélancolique (voire « salement romantique ») à la bande-annonce. Hélas, rien de tout cela n’est à l’abri de plusieurs personnages sous-développés et d’un film écorché par les ruptures de ton.

Dans Avant mon cœur bascule, on suit l’avant et l’après de Sarah, une ado rebelle (Clémence Dufresne-Deslières, la belle découverte de ce film) qui éprouve zéro remord à voler des gentils automobilistes qui l’embarquent en auto-stop. Elle évolue sans heurts dans ce milieu criminel jusqu’au jour où un professeur d’histoire (Alexis Martin) meurt d’une crise cardiaque alors qu'elle le dérobe. Jusqu’alors prise dans un engrenage de petite délinquance, la tragédie viendra bouleverser son quotidien, engendrant une profonde remise en question.

Mais au lieu de se faire discrète après coup, voilà que Sarah emprunte le chemin classique du « je-suis-responsable-de-la-mort-de-votre-amant/fils/bébé-mais-je-souhaite-quand-même-effectuer-un-rapprochement », dépeint de façon plus convaincante dans des films québécois tels Maelström ou The High Cost of Living. L’ado cherche à connaître l’amoureuse complètement désemparée du défunt (Sophie Lorain), d'abord pour s’enfuir d’un monde sans issue, peut-être aussi pour se faire pardonner…

Dufresne-Deslières incarne avec justesse cette ado qui ne voit plus clair, qui souhaite simplement un peu de tendresse et d’amour. La tragédie la frappant de plein fouet, elle part en quête d’une certaine rédemption… Mais malgré de très beaux plans de ballons dans le vent et de routes qui s’étendent à perte de vue, on se rend vite à l’évidence que le film (apparemment inspiré de quelques mauvais coups du réalisateur à l’adolescence) manque de profondeur.

L’histoire s'épuise avant que Sarah fasse son grand aveu, qu’elle rembourse une dette monétaire mais aussi sa dette morale. Les relations que Sarah entretient avec un autre jeune délinquant (Étienne Laforge) ainsi qu’avec le personnage interprété par Sébastien Ricard – un criminel  « sénior » un brin détraqué (serait-ce leur mentor, ou encore leur pimp?) – demeurent flouent et difficiles à saisir. Idem pour le rapprochement étrange que Sarah effectue auprès de la nouvelle veuve. (La scène de danse spontanée dans le salon d’une Lorain complètement ivre est particulièrement indéchiffrable…) Les motivations des personnages sont rarement justifiées ou même vraisemblables.

Dommage, j’aime beaucoup le cinéma intimiste de Sébastien Rose. Je voulais vraiment y voir un cri du cœur. Au final, j’y vois plutôt un portrait de la délinquance et de la rédemption auquel j'adhère difficilement…

 

Avant que mon cœur bascule
Maintenant en salles

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