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The Dark Knight Rises: joyeusement démesuré, sans toutefois surpasser les autres volets

Les fans de Nolan et des bandes dessinées ne risquent pas d’être déçus par ce troisième et dernier chapitre qui boucle la boucle avec son Gotham aux prises avec une effroyable révolution. C’est sans contredit un très bon divertissement estival. Mais arrive-t-il à la cheville du chapitre précédent ? Malheureusement pas.


Christian Bale et Anne Hathaway, The Dark Knight Rises

Batman se fait discret
Huit ans après que Batman ait fait tout un ménage à Gotham, en se débarrassant du très dérangé Joker et du non moins défiguré Harvey Dent, la chauve-souris légendaire a disparu et son alter égo philanthrope Bruce Wayne (Christian Bale) vit cloitré chez lui, complètement en retrait de la société… au grand dam de son fidèle valet (Michael Caine). Mais lorsque Gotham tombe aux prises de Bane (Tom Hardy), un super-terroriste sadique dont les traits évoquent Hannibal Lecter, Bruce quitte sa caverne afin d’éradiquer le mal rongeant sa ville et prévenir l’explosion d’une bombe nucléaire. Deux nouvelles séductrices rôdent autour du héros alors que ce dernier s’engage dans une course effrénée contre la montre: une Catwoman mystérieuse et malhonnête (Anne Hathaway) et Miranda Tate (Marion Cotillard), une grande mécène qui se porte à la rescousse de Wayne Entreprises.

La première heure du film tarde à placer de façon stratégique tous ses pions, ce qui se fait malheureusement au détriment du momentum, qui avait pourtant été donné dès la scène d’ouverture: une saisissante attaque terroriste d'un Bane qui détourne un avion de la CIA. Le film ne reprendra véritablement son envol que lors d’une prise d’otage à la bourse de Gotham, ainsi qu'avec une scène explosive dans un stade de foot. Évoquant le sublime braquage de banque du Joker qui avait lancé le bail dans Dark Knight, ces quelques scènes sont tout à fait saisissantes. 


Bane au Gotham City Stock Exchange dans The Dark Knight Rises

Choix convenus
Nolan a prouvé aux plus sceptiques que des sagas de superhéros peuvent être réfléchies, apocalyptiques, nuancées et sans réponse facile, tout en ayant l’appui du grand public. Ici, il fait pourtant quelques choix étonnamment convenus au niveau du scénario. Des petites amourettes à la James Bond, des monologues parfois interminables pour justifier la motivation de personnages, quelques scènes de combats un peu anémiques, une trame sonore souvent trop appuyée…

Pourtant, malgré le profil sous-développé de certains personnages, Nolan démontre encore ici l’étendue de son talent. Cette épopée sinistre fait écho à notre réalité (terrorisme, soulèvements populaires, crise financière) et soulève un tas de questions préoccupantes sans jamais tomber dans la caricature ou le cliché. Et en tant que cinéphile qui en a marre des films présentés en 3D pour aucun motif valable (Tintin, The Amazing Spiderman, StreetDance 2, …), voilà un réalisateur qui n’a aucune envie de se faire des amis au département marketing de Warner Bros avec l’inclusion de quelques scénettes agrémentées d’effets 3D.


Joseph Gordon-Levitt dans The Dark Knight Rises

Excellents Joseph Gordon-Levitt et Tom Hardy
Au sein d’une brochette d’acteurs talentueux à qui l’on ne permet pas toujours de se démarquer (Bale, Hathaway, Caine, Cotillard), c’est Joseph Gordon-Levitt, en jeune flic brave et débrouillard de Gotham, qui vole la vedette avec son jeu tout en retenue et d’un naturalisme déconcertant. Hathaway nous fait bien rire, et s’amuse visiblement en incarnant une super-féline tantôt forte, tantôt agace, qui ne sait jamais trop où se ranger sur le continuum bien/mal. Mais le scénario lui donne très peu de jeu pour en construire autre chose qu’une vixen qui jette des regards chargés d’érotisme avec chaque entrée en scène.

Tom Hardy en Bane se démarque lui aussi du lot, semant la terreur et cultivant le flou quant à sa grande cruauté. Même si sa voix étouffée aurait gagné d’être un peu plus audible, sa démarche de tueur omnipotent au sommet de sa forme physique évoque tout un lot de cauchemars. Le braquage du Gotham City Stock Exchange, ainsi que la poursuite avec otages sur motos font monter l’adrénaline de quelques crans. C’est tout à son honneur.

Cette trilogie aura été joyeusement démesurée, nuancée et d’une pertinence troublante. Un personnage du film affirme que l’innocence est un concept trop lourd de sens pour qu’on puisse l’appliquer à Gotham City. Et c’est ce qui rend le film si puissant: toutes ces zones grises, ces dégradés obscurs de vérités et de mensonges, de bonne et de mauvaise foi. Une expression anglo veut que «le diable soit dans les détails». C’est également la grande réussite de cette trilogie ambitieuse.

 

***1/2