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Le Détesteur: parce que la grève ne se terminera pas d’ici demain, les crétins contre-attaquent

Suite à ma chronique de la semaine dernière, certains indécis m'ont laissé entendre que c'était par la faute des gens comme moi s'ils penchaient davantage du côté vert. Je rappelle que ma chronique pointait du doigt les crétins. Si le cynisme de ma plume se veut suffisant pour «convaincre» un indécis d'être en faveur de la hausse des frais de scolarité, seulement pour me contredire et par conséquent le mouvement étudiant; wow en crisse. Pour plusieurs, virer au vert s'avère même une punition bien méritée pour les rouges qui ont pris d'assaut les rues. Bref, ils «punissent» les étudiants pour mes propos, pour ceux d'autres chroniqueurs, pour une manifestation qui a mal tourné, pour tout. C'est comme si chaque personne qui se prononçait devenait systématiquement le nouveau leader de la cause, à chaque fois.

Quand bien même que quelqu'un décidait d'se pull up un World Trade Center sur la résidence de Jean Charest (!), ça ne justifierait en aucun cas un changement de position soudain envers la cause. L'idée, c'est d'arriver à faire preuve de discernement et de s'éviter le titre de tabarnack de crétin. On ne parle pas ici d'un scénario de lutte dans lequel on doit prendre partie pour le heel ou le face.

Même les analystes et stratèges politiques invités à RDI/LCN tentent de décortiquer les stratégies qu'entreprendra le gouvernement pour te convaincre toi, l'opinion publique (ok, moi aussi). Ils parlent de toi, dans ta face, et te dévoilent des méthodes utilisées par le premier ministre pour te charmer, toi le simple d'esprit. Ils ne se donnent même plus la peine d'être subtils.

Je résume.

Les analystes: «On pense que Jean Charest tentera de mettre l'emphase sur Tintin au Congo pour faire diversion, histoire de gagner l'appui des plus vulnérables.»

Jean Charest en point de presse: «Allô, je suis Jean Charest. Tsé, Tintin au Congo? Ok. Voilà.»

Toi: « Retournez donc à vos cours!! Vous avez pas lu Tintin au Congo, ça paraît!! HAHA!! Vous avez l'air d'une belle gang de tatas là!!»

Le clash entre nous

Samedi soir dernier, j'me suis rendu, comme d'hab, à la manifestation nocturne, dorénavant quotidienne. Il manquait beaucoup de gens suite à la déclaration «d'entente de principes» entre le gouvernement et les associations étudiantes; j'imagine donc que le temps portait à la réflexion. Moins imposante, notre marche permettait toutefois aux passants de circuler avec aisance sur les trottoirs, c'qui m'a permis de porter une plus grande attention aux conversations qu'avaient les gens entre eux.

J'me sentais comme dans Grand Theft Auto. Sitôt notre présence détectée, sitôt les récurrents commentaires se faisaient entendre. Les mêmes, sur repeat. Comme dans GTA quand on frôle une granny grincheuse inquiète pour sa sécurité, programmée pour nous ressortir les mêmes trois phrases prévisibles. Surréaliste. Les mots-clés à retenir sont les suivants: Kraft Dinner, perdre une année de salaire, cry babies, trouvez-vous une job, moins cher qu'ailleurs, iPhone. Tout l'monde avait son mot (ou celui de Martineau) à dire.

On s'est même fait insulter sur Crescent, le 450 de Montréal. C'est là que j'vous ai reconnus, gens qui m'ont autrefois côtoyé. J'me souviens de cet univers où tout débat se voit impossible puisque régi par la certitude, où les convaincants ont raison et ceux qui remettent en doute ont tort. Où ses habitants ne comprennent pas qu'ils ne comprennent pas.

Il vient de là, le clash entre nous. Votre certitude inébranlable, votre dégoût pour le risque, la peur de perdre une année de salaire. Vous calculez tout de façon à suivre la ligne préalablement tracée à quelques jours de votre naissance. La simple idée de la faire dévier ne serait-ce que d'un centimètre provoque chez vous des crises d'angoisse. Chaque jour est un combat qui vous rapproche de plus en plus des standards de normalité. Votre conception de la vie est remise en perspective lentement mais peut-être, 10 années à la fois.

Bref, quand on vous parle de nos valeurs, vous faites face à l'incompréhension et s'ensuivent les insultes. Parce que pour plusieurs d'entre nous, perdre une année d'études ou de salaire importe peu. L'urgence du confort immédiat, on vous laisse ça. On n'est pas très familier avec l'individualisme non plus, c'est possible, ça aussi. Vous devez nous croire.

Finalement l'argument du iPhone pourrait donc avoir effectivement un semblant de bon sens pour les gens qui ont les mêmes valeurs que vous, j'en conviens… mais n'a tellement rien à voir avec les revendications étudiantes. Et malgré l'écart qui sépare nos valeurs, on est quand même en mesure de vous comprendre, nous qui avons également connu la petitesse d'esprit, à une autre époque. De votre côté, l'inverse me paraît peu probable par contre.

La solution? Comprendre que vous ne comprenez pas me semble une bonne trousse de départ.

Je vous déteste.

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